Noir Médoc
Les nouvelles ne restent-elles pas un genre trop peu lu parce qu’on lui préfèrerait l’ampleur d’une histoire qui s’étend sur un grand nombre de pages et constitue un voyage au long cours ?
Ce serait oublier que la grande qualité des nouvelles réussies – et c’est le cas de celles de Yan Lespoux – est de parvenir à saisir les fulgurances, l’essentiel d’une vie… parce qu’elles ont le génie de se placer au moment exact où tout bascule.
Parfois plus simplement, elles captent le moment où quelque chose se cristallise autour d’une situation, d’un propos méchant et qui blesse, d’un fait insupportable, d’une pensée capable de donner une toute autre perspective à la réalité.
Alors bien sûr, le sujet de prédilection de Yan Lespoux reste le Médoc, ses paysages de dunes et de forêts de pins, l’âpreté du rapport avec la mer, l’attachement viscéral à la terre, la bataille incessante avec les « étrangers », ces insupportables Parisiens, Bordelais ou Toulousains.
Mais surtout ce que l’auteur capte, c’est L’Humanité qui se cache derrière ces jalousies, ces passions mal contrôlées, ces enthousiasmes ou ces pulsions morbides, tout ce qui fait que l’homme reste un homme, en somme.
Alors ses personnages peuvent bien être Médocains, c’est bien de nous dont ils parlent.
Et ils nous tendent un miroir dans lequel bien souvent chacun peut se reconnaître.
J’ai particulièrement aimé l’ambiance noire de certaines nouvelles, celles dont on sent dès le début qu’elles vont mal finir mais qui inscrivent le personnage dans un maelström de sentiments contradictoires menant à l’inéluctable tragédie.
J’ai aimé que derrière l’apparente rudesse des âmes, la fragilité soit mise à nu, parce que si c’est la marque d’un bon observateur du genre humain, c’est aussi la marque des grands écrivains.
Aux éditions Agullo
A noter : l’auteur a été reçu en live VLEEL (ici pour le compte-rendu) et l’intégralité de la rencontre est à retrouver sur YouTube.
Moonpalaace 