littérature

Un mariage américain – Tayari Jones

Être noir en Amérique : c’est ce que ce roman qui sort aujourd’hui en librairie ausculte sous toutes les coutures, du racisme latent à l’erreur judiciaire.

« On dit qu’une balle ne porte pas le nom de sa victime. Et bien, je pense qu’on peut en dire autant de la vengeance. Et peut-être de l’amour. C’est une tornade mortelle qui frappe au hasard. »

Comment réagit un homme plongé en pleine erreur judiciaire, accusé à tort d’un viol qu’il n’a pas commis, et risquant de perdre absolument tout ce qu’il a construit, craignant à raison de voir sa femme aimante s’éloigner de lui, troquant sa maison contre la vie carcérale, contraint surtout d’abandonner tous les rêves et les projets qu’il nourrissait pour sa famille ?

Et comment réagit sur le long terme sa femme restée seule dans le foyer ?

Cet homme c’est Roy, jeune noir d’Atlanta, et cette histoire est la sienne : occupant une chambre d’un hôtel du Mississippi avec sa femme Celestial, il est arrêté au petit matin sur les dires d’une voisine de chambre qui l’accuse de l’avoir violée, et il est condamné à 12 ans de prison.

Sous les projecteurs de la narration, son destin est ausculté minutieusement par l’auteure, de son enfance dans un milieu modeste à sa volonté de s’élever socialement, et rappelle immédiatement toutes les trajectoires brisées des noirs devenus trop souvent les boucs émissaires de l’Amérique…

Dans un récit fluide et mené de façon efficace par les trois narrateurs que sont Roy, Celestial et André son ami d’enfance, Tayari Jones fait la démonstration tragique qu’être noir en Amérique est un véritable risque, que ni la police ni la justice ne semblent considérer un homme noir comme un être honnête et droit, et que la présomption d’innocence n’existe qu’en fonction de la couleur de peau.

J’ai lu ce roman d’une traite, happée par cette histoire très réaliste et fascinée par le mécanisme fatal qui broie les destins. L’auteure choisit délibérément de saisir la situation de ses personnages de l’intérieur et fait surtout la chronique de l’effondrement d’une relation : l’accent est mis sur la dimension humaine et personnelle, comme en témoignent les nombreuses lettres échangées par les personnages, et s’attarde assez peu sur l’aspect social et judiciaire de l’affaire, ce que certains regretteront peut-être.

Qualifié de « bouleversant » par Barak Obama, ce roman a obtenu le Women’s Prize for Fiction en 2019.

Chez Plon

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