Ma Dévotion – Julia Kerninon

J’ai été touchée par la grâce de ce roman qui instaure une ambiance aérienne, délicate et sensuelle, promène le lecteur dans les belles villes de Rome, Amsterdam, et Boston pour dérouler l’histoire de deux vies très étroitement liées…

Helen et Franck se rencontrent à 12 ans lorsque leurs parents ambassadeurs à Rome sont amenés à travailler ensemble et à nouer des liens d’amour comme de rivalité.

La relation entre les deux enfants oscille alors entre fraternité et amitié, elle devient ensuite un amour qui ne dit pas son nom, liant indéfectiblement les deux personnages.

Mais ne vous y trompez pas…
Rien n’est aussi simple que les apparences… et Helen qui vit au milieu des livres vous le dirait sans détours : «  il ne faut pas juger un livre à sa couverture », ce que l’on voit de l’extérieur ne révèle jamais la profonde complexité d’une relation entre un homme et une femme.

Helen devenue éditrice accompagne toute sa vie ce personnage qu’elle a parfois l’impression d’avoir façonné de ses mains, et qui traverse une gloire éclatante en tant qu’artiste peintre alors qu’elle vit dans son ombre et lui est indispensable, sans qu’il le sache vraiment, sans qu’il mesure cette dépendance.
Elle développe à son égard un sentiment très puissant : la dévotion.
Ce sentiment qui suppose le sacrifice total de sa personne au bénéfice d’une autre soulève de nombreuses questions…

Jusqu’où peut-on aller pour l’être aimé ?
Peut-on engager sa vie entière dans un désir d’absolu ?
Et quel en est le point de rupture ?
La puissance d’un amour contient-elle en germe une force de destruction ?

La dévotion ressentie pour Franck est synonyme d’ambiguïté et d’exclusivité et est de nature à faire basculer la relation…
La tension dramatique monte alors dans un enchaînement de faits qui mènent à un dénouement tragique sans que rien ne semble pouvoir enrayer la fatalité de ce destin…
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C’est ce qu’Helen entreprend de raconter à Franck lorsque 23 ans après l’avoir vu pour la dernière fois dans de terribles circonstances, elle le croise par hasard à Primrose Hill et déroule sa poignante confession. J’ai été touchée par cette histoire d’amour hors norme : Helen se rêverait en princesse pour laquelle on déclenche la guerre de Troie alors qu’aucun éclat ne semble vouloir bouleverser sa vie ; tandis que Franck qui n’aurait qu’à tendre la main pour se saisir du grand amour succombe à la passion pour une autre comme sous le charme d’un philtre…

C’est un roman d’une grande beauté, d’une sensibilité qui émane de chaque page, d’une écriture à la fois gracieuse et profonde et qui dit de façon très juste le trouble des sentiments et la complexité d’un amour sans partage.

D’une certaine façon, nous sommes restés ensemble les enfants que nous avions été. Notre amitié – comme le mot tinte étrangement à mon oreille ! – nous a comme figés, immobilisés dans un temps impassible.