
La Neuvième Heure plonge le lecteur dans une époque où les Petites Sœurs soignantes des pauvres malades de la congrégation de Marie « apparaissaient dans tous les foyers chaque fois qu’une crise ou qu’une maladie en perturbait la routine ».
Nous avons oublié ce temps où ces femmes dévouées, empathiques et serviables se mettaient entièrement à la disposition des gens de leur quartier, secouraient les jeunes veuves, accueillaient les vieilles dames sans le sou, apportaient des repas aux plus démunis : l’auteure donne corps et voix à ces femmes fortes que leur destin a placées sur le chemin de personnages abîmés par la vie, comme pour en adoucir la misère et le chagrin.
Ce roman raconte comment le monde d’Annie, jeune mariée enceinte et désespérée après le suicide de son mari, est secourue moralement et socialement par la bien nommée sœur Saint-Sauveur, apparue comme par miracle dans le chaos de sa vie.
S’en suit alors le récit des journées d’Annie, de sa vie de jeune mère de la petite Sally, et de son quotidien de blanchisseuse au couvent, entremêlé à celui des tâches innombrables des sœurs qui pénètrent les foyers en détresse et sillonnent la ville pour porter secours à leurs prochains.
C’est aussi l’occasion pour l’auteure de montrer la vie d’un quartier, le Brooklyn des immigrés irlandais catholiques, où les gens vivent souvent dans la misère, font preuve de petites mesquineries parfois ou au contraire de grandeur d’âme, de solidarité, et de don de soi, au premier rang desquels se placent les petites Sœurs.
Une très grande humanité se dégage de ces pages : Alice McDermott fait le portrait sensible de la société des sœurs, et montre combien leur rôle est essentiel dans la cohésion de ce microcosme social que représente le quartier.
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L’abnégation, la bienveillance et la charité mais aussi la lucidité et la malice emplissent ces pages : le sujet est singulier, le roman une réussite.

Chez La Table ronde